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La shrinkflation, ou comment tromper légalement le consommateur

octobre 4, 2023
supermarché

La shrinkflation, tout y passe ! Des chips aux couches, en passant par les croquettes, certains industriels (peu scrupuleux ?) réduisent nonchalamment, subtilement la contenance de leurs produits, parfois en haussant leur prix ! Objectif : voiler les effets de l’inflation, en « shrinkant » (rétrécissant) les produits, d’où le terme : « shrinkflation ». Et quasiment tout le monde s’y met, même Mcdo, qui aurait apparemment « shrinker » son Big Tasty, sans pour autant en réduire le prix… Certes, la pratique interroge sur « l’honnêteté » des industriels, mais qu’en est-il du consommateur ? Après tout, ne sommes-nous pas responsables de lire les étiquettes avant de mettre le produit au caddie ? Dénoncer les seuls industriels ne serait-il pas une forme d’infantilisation des consommateurs ? Eléments de réponse !

Shrinkflation : la grande distribution met les industriels au pied du mur

La responsable des campagnes chez Foodwatch s’interroge, à juste titre, sur la propension des marques à le crier haut et fort sur leurs emballages, dès lors qu’elles proposent un format familial ou une quelconque promotion. Or, ces dernières n’en font pas autant lorsqu’elles réduisent la quantité. Bienvenue dans le monde de la « shrinkflation », une pratique certes « légale » (tant que l’étiquetage du produit est conforme), mais qui a du mal à passer côté consommateurs, et on comprend aisément pourquoi…

Concrètement, la pratique consiste à réduire le volume d’un produit, sans forcément changer d’emballage, et encore moins de prix. Parfois, les prix peuvent même augmenter… L’objectif est simple : masquer les effets de l’inflation, en offrant moins de produit pour éviter une hausse drastique des prix, qui a tendance à rebuter le consommateur. Et dans ce « chaos » des prix, les enseignes de la grande distribution sortent de leur silence, dénonçant les industriels, et exigeant d’eux une réduction des prix ou, à minima, plus de transparence. Alexandre Bompard, PDG de Carrefour, n’hésite pas à user d’une stratégie audacieuse de name and shame. L’affichage de Carrefour sur les produits concernés par la shrinkflation est sans équivoque : « Ce produit a vu son poids diminuer et le prix demandé par notre fournisseur augmenter ». Une démarche qui, sans surprise, a fait sensation sur les réseaux sociaux…

De son côté, Dominique Schelcher, à la tête de Super U, critique la faible réactivité des industriels face à l’inflation. Même son de cloche du côté de Thierry Cotillard, président du groupement Intermarché, qui qualifie cette méthode de « malvenue ». Mais c’est Michel-Edouard Leclerc qui dépeint le tableau le plus alarmant. En effet, le président du groupe Leclerc s’interroge publiquement sur l’absence d’intervention des plus hautes instances gouvernementales pour encadrer les pratiques industrielles. Plus encore, il suggère que non seulement les industriels, mais aussi l’Etat, pourraient tirer avantage de cette inflation qu’il n’hésite pas à qualifier de sournoise. Il assène : « L’inflation est un impôt qui n’est pas discuté au Parlement, c’est un impôt inégalitaire ». Sa conclusion est sans appel : « Le consommateur est le dindon de la farce ». Justement, parlons du consommateur…

Et le consommateur dans tout ça ?

Le consommateur, dindon de la farce, disait Michel-Edouard Leclerc. A-t-il forcément raison ? Oui et non… Si la shrinkflation a été largement dénoncée comme une tromperie des industriels, le consommateur a aussi un rôle prépondérant dans cette équation. En effet, il est de la responsabilité de chacun d’entre nous de se pencher sur les étiquettes pour comprendre exactement ce qu’il achète. Les informations y sont clairement mentionnées : prix, contenance, composition. Ne pas le faire, c’est s’exposer à des surprises.

L’infantilisation constante du consommateur, le présentant comme le sempiternel « dindon de la farce », est une attitude quelque peu réductrice. Certes, le consommateur est souvent victime, mais il est aussi acteur. La réglementation en vigueur garantit une information éclairée : les prix sont clairement affichés, toutes taxes comprises, de manière visible et compréhensible. Qu’il s’agisse d’achats en boutique, sur internet ou même à domicile, l’obligation de transparence est imposée aux professionnels. D’où l’importance de rappeler aux consommateurs qu’ils disposent des outils nécessaires pour faire des choix avisés. D’autant plus que des plateformes telles que Signal.conso.gouv.fr existent pour signaler toute irrégularité. Par ailleurs, les promotions ont aussi leurs propres règles d’affichage, renforcées par une directive européenne en 2022, qui assure une plus grande protection contre les faux rabais.

La shrinkflation sous le feu des projecteurs de l’Etat

Oui, le consommateur a une part de responsabilité à assumer, mais pas autant que les industriels. Aujourd’hui, cette pratique que l’on peut aisément qualifier d’insidieuse est sur le radar de l’Etat. Au cœur de cette bataille, le ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, prend fermement position en défenseur des droits des consommateurs. Qualifiant cette pratique de véritable « arnaque », le ministre ne mâche pas ses mots en dénonçant certaines manœuvres. Les bouteilles de jus d’orange, dont le contenu passe discrètement de 1 litre à 900 ml, en sont un exemple criant pour lui : c’est ni plus ni moins que du « vol ».

En réponse à cette situation, Bruno Le Maire n’a pas seulement opté pour des paroles fortes : des actions concrètes sont en route. Un projet de loi, prévu pour octobre, vise à imposer aux industriels une obligation de transparence renforcée. Objectif : rendre indiscutablement évidente toute réduction du contenu d’un emballage pour le consommateur. Les jours de la réduction discrète pourraient donc être comptés. Cela dit, des questions restent tout de même en suspens : si la transparence est mise en avant, la question de la répercussion de la baisse des matières premières, soulevée par des acteurs majeurs comme Michel-Edouard Leclerc, reste sans réponse. La voie vers une totale clarté dans les relations consommateurs – industriels est encore long, mais une étape significative semble sur le point d’être franchie.

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